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Für eine andere Entwicklungspolitik!

Beitrag vom 25.04.2024

Jeune Afrique

« Il faut libérer l’otage Bazoum ! » :l’appel d’un collectif internationald’avocats

Neuf mois quasi jour pour jour que l’ancien président nigérien estdétenu arbitrairement. De New York à Dakar, en passant par la Côted’Ivoire et la Mauritanie, mais aussi le Niger, des avocats de renom(Brahim Ould Ebety, Florence Loan, Mohamed Seydou Diagne, MoussaCoulibaly et Reed Brody) exigent sa remise en liberté sans délai.

Neuf moisd’aberrations qui frôleraient le risible si les droits humains les plusbasiques et les libertés les plus fondamentales d’un chef d’État éludémocratiquement n’étaient pas écrabouillés par des militaires enquête de légitimité.

Le prix de la démocratie

Mohamed Bazoum a été élu président de la République du Niger enfévrier 2021. Son élection a été démocratique, transparente, inclusive et saluée par la communauté internationale. Aucune crise politiqueinterne majeure, ni aucune situation d’urgence susceptible de mettreen péril la nation n’étaient en perspective. Pourtant, le 26 juillet 2023,des membres de la Garde présidentielle renversaient l’ordreconstitutionnel. De nombreuses personnes ont d’abord vu le coupd’État sous un angle géopolitique, mais, au fil des semaines quisuivaient, des éléments publiés dans la presse pointaient plutôtquelque velléité personnelle de défendre des intérêts privés. Le Conseilnational pour la sauvegarde de la patrie (CNSP) était né.
Dont acte.

Le président Mohamed Bazoum, sa femme, Hadiza, et leur fils SalemMohamed Bazoum étaient immédiatement arrêtés et retenus dans larésidence officielle, à l’intérieur du palais présidentiel. Commençait alors pour eux un calvaire qui continue aujourd’hui, neuf mois plustard. Homme politique aguerri et engagé, démocrate reconnu etrespecté, Mohamed Bazoum a toujours refusé de démissionner. Safamille et lui payent aujourd’hui le prix de leur attachement à laConstitution : en ne courbant pas l’échine, il rappelle au monde le prixde la démocratie.
La prise d’otages dure depuis neuf mois, neuf moisd’inhumanité.

Il est ici essentiel pour nous, ses avocats, de rappeler avec fermeté quel’arrestation et la détention de Mohamed Bazoum et de sa famille sonttotalement illégales. Personne ne peut leur rendre visite, hormis leurmédecin. Si, pendant les premiers mois de détention, la familleBazoum a pu rester connectée au monde extérieur grâce à leurtéléphone, celui-ci leur a été retiré en octobre 2023. Depuis cette date,nous n’avons aucun moyen de nous entretenir avec eux. Puisqu’ils sontdétenus en dehors de toute procédure, à quel magistrat pouvons-nousdemander un droit de communiquer ?
?
Le soutien de la Cedeao

Dès le coup d’État, la famille Bazoum a pu compter sur le soutien de laCedeao. L’organisation ouest-africaine et la majorité de ses chefsd’État, à l’exception de ceux issus eux-mêmes de putschs, n’ont eu decesse de réclamer la libération du président. En vain. Le CNSP a misen garde la Cedeao contre tout recours à la force pour le libérer : ceserait « son cadavre qu’il [faudrait] venir chercher ». Le 10 décembre2023, les chefs d’État de la Cedeao ont dépêché leurs pairs sierra-léonais, béninois et togolais pour un « rétablissement rapide de l’ordreconstitutionnel ». Tous, hormis le président Faure Gnassingbé, ont étéempêchés d’atterrir à Niamey. Seule réussite : le président togolais aobtenu le transfert de Salem Bazoum au Togo, après qu’il a été inculpépour complot contre l’autorité de l’État. Le fils du président vient seulement d’être autorisé à quitter Lomé, oùil était soumis à une sorte de régime de semi-liberté. Saisie par nos soins, la Cour de justice de la Cedeao a rendu le 15 décembre 2023 unarrêt historique ordonnant aux autorités de fait du Niger de libérer immédiatement le président et sa famille, et de rétablir l’ordreconstitutionnel. Là encore, le CNSP a opté pour la fuite en avant en notifiant sa décision de se retirer de la Cedeao, oubliant que le Niger restait tenu de « s’acquitter des obligations qui lui incombent »pendant une durée d’un an. Mais aujourd’hui, force est de constaterque la médiation organisée par la Cedeao est un échec et que lesputschistes n’ont cure de la règle de droit.

« Crimen sine lege »

Depuis peu, une nouvelle lubie anime le CNSP. Il faut, coûte quecoûte, faire condamner le président Bazoum, quitte à distordre le droitnational à l’extrême. Il bénéficie, en tant que président, d’uneimmunité ? Le CNSP crée une juridiction dont il nomme lesmagistrats et la saisit le 5 avril pour trancher cette question. Tout enfoulant aux pieds les droits fondamentaux de la défense – nous n’avonsaccès ni au dossier ni à notre client –, la junte oublie sans doute qu’unetelle procédure n’est possible que pour un « ancien président ». Mais leprésident Bazoum n’est pas démissionnaire, il est toujours titulaire deson mandat. Pour justifier le coup d’État, ne faut-il pas l’accuser despires crimes ? Des poursuites sont en train d’être diligentées contrelui, notamment pour « complot contre la sûreté de l’État ». Leprésident Bazoum est accusé d’avoir tenté de s’évader alors même qu’ilétait détenu illégalement…

Avec cette nouvelle procédure, le CNSP veut entériner une situationpolitique de fait, sans convaincre par le droit. Et la famille Bazoum,dont les droits les plus fondamentaux sont violés chaque seconde, enest la principale victime.

Au nom de l’État de droit et de la dignité humaine, il faut sauver leprésident Bazoum !
Les signataires :

Brahim Ould Ebety, ancien bâtonnier de Mauritanie
Florence Loan, bâtonnière dauphine de Côte d’Ivoire
Mohamed Seydou Diagne,avocat au barreau de Dakar
Moussa Coulibaly, ancien bâtonnier du Niger
Reed Brody, avocat au barreau de New York